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Ports de l'estuaire de la Gironde
France > Nouvelle-Aquitaine
Historique
L’estuaire, bien souvent considéré comme une frontière et un obstacle, constitue également un espace de circulation des hommes et des marchandises qui s’inscrit dans un territoire plus large, entre La Rochelle, Bordeaux et Libourne, et bien plus encore dans un trafic mondial. Dans cette vaste zone, les ports forment des interfaces entre les terres et les eaux, vers des horizons plus ou moins lointains. Leurs aménagements révèlent une histoire économique de l’estuaire et de ses rives, tout en traduisant des modes de vie locaux. Une typologie de ces aménagements réalisés depuis le 18e siècle offre une lecture singulière de cet espace. Elle met en évidence des spécificités géographiques, entre l’amont et l’aval, et donne à voir la diversité des échanges.
Marqueur de pouvoirs et de privilèges, le port est une installation stratégique indissociable des sites défensifs qui dominent l’estuaire, notamment sur sa rive droite. Au Moyen Âge, à Blaye ou à Bourg, il est situé au pied du château, en dehors des fortifications, une porte dans l’enceinte en permettant l’accès. Les ports jouissent de privilèges et d’avantages afin de favoriser le commerce. Dès le 12e siècle, celui de Bourg est essentiel pour le transport du vin. À noter enfin que les échanges dans l’espace estuarien ont longtemps été tributaires des privilèges de Bordeaux renforcés en 1401 : il était défendu de charger des vins pour l’étranger en un lieu quelconque depuis l’estey Grebat, à l’extrémité nord de la ville au bord de la Garonne, jusqu’au château de Castillon en Médoc. L’exportation directe du vin vers les pays du Nord était donc interdite, ce qui explique certainement un essor plus tardif du vignoble médocain et un développement limité de ses ports avant le 18e siècle. Libourne, en amont sur la Dordogne, s’est, quant à elle, arrogé dès le Moyen Âge la liberté de transporter en toute saison ses vins et ceux de l’arrière-pays jusqu’à la Gironde sans passer par Bordeaux, s’assurant ainsi la maîtrise du fleuve.
L’histoire des ports est aussi étroitement liée à la morphologie des rives et à leur évolution. Les corniches rocheuses, au nord et au sud de la rive droite, offrent une limite stable tandis que les vastes zones de marais sont des espaces changeants, soumis aux variations des rivages. Des ports étaient implantés le long des coteaux qui constituaient autrefois le bord du continent baigné par les eaux, comme en témoignent les hameaux de Beaumont à Saint-Fort-sur-Gironde ou Saint-Nicolas (saint patron des marins) à Saint-Dizant-du-Gua. Dès le 16e siècle, les ports de la rive droite sont confrontés au comblement des marais qui menace leurs activités, entraînant leur déplacement voire leur disparition.
Sur la rive gauche, Pauillac permet, depuis l’Antiquité, une halte privilégiée dans la remonte ou la descente de l’estuaire, tributaire des marées. Le chenal du Gahet au nord et celui du Gombaud au sud de la ville servaient de refuge aux bateaux, malmenés par les courants ou les vents. Cette configuration de ports d'échouage aménagés dans les esteys, étiers ou chenaux, petits ruisseaux qui forment le maillage hydrographique des rivages, est la plus répandue. L’activité des ports est donc dépendante des cours d’eau et des marais. Les travaux de dessèchement menés à partir du 17e siècle dans le Blayais, à Conac et en Bas-Médoc devaient aussi faciliter le fonctionnement de ces ports qui assuraient le débouché des denrées de l’arrière-pays. Les premiers équipements alors installés ont vocation à assurer la gestion des eaux dans les chenaux et les jalles. Les vannes et autres écluses sont aussi utilisées pour chasser les vases qui s’y accumulaient et qui empêchaient l’accès des bateaux.
S’adaptant aux dispositions naturelles offertes par les rives, les ports ne bénéficiaient sans doute d’aucun autre aménagement spécifique. Pieux en bois, planches permettant de débarquer les marchandises, constituaient certainement les principales structures. L’ancre était jetée à distance du bord limoneux et le débarquement s’effectuait à l’aide de petites embarcations. À marée haute, les bateaux pouvaient tenter l’entrée dans le chenal, s’échouant naturellement aux basses eaux. Toutefois, certains ports stratégiques bénéficient d’équipements particuliers. À Royan, une jetée, ou épi, est établie dès le 16e siècle.
Au 18e siècle, l’importance économique du commerce du port de Bordeaux entraîne d’importants travaux d’amélioration de la navigation et d’équipement des ports estuariens. À partir des années 1830 et jusque dans les années 1860, l’État et ses ingénieurs des Ponts et Chaussées, parmi lesquels Lescure-Bellerive, Potel, Lessore ou Botton en Saintonge, et Thénard ou encore Pairier en Médoc, mettent en œuvre un vaste programme d’équipement des ports estuariens : les méandres des chenaux sont redressés, leurs cours allongés, les bords dotés de chaussées empierrées, de quais verticaux, de cales inclinées, de perrés, d’appontements en bois et de bornes d’amarrage ; des écluses de chasse sont installées, reprenant les principes déjà appliqués lors des travaux de dessèchement des marais. Des retenues d’eau pouvaient s’effectuer dans un bassin, dont l’écluse ouverte à marée basse libérait la masse d’eau accumulée pour repousser les vases. L’ensemble de ces modifications change radicalement la physionomie des ports, régularisés et équipés à grands renforts de maçonnerie.
Au cours du 19e siècle, le transport de voyageurs sur l’estuaire prend de l’ampleur, consécutif à l’essor de la navigation à vapeur. L’augmentation du trafic nécessite l’installation de débarcadères spécifiques pour assurer la sécurité des embarcations et des passagers. Ces aménagements s’inscrivent dans les projets d’amélioration des ports estuariens des années 1830-1840. Le premier à être équipé est celui de Blaye, en 1836, et Pauillac suit de peu en 1838. Au cours du 19e siècle, la fréquentation croissante des bateaux à vapeur et l’aménagement de nombreux débarcadères favorisent les communications entre les rives.
Dans la seconde moitié du 19e siècle, le déploiement du chemin de fer contribue au développement des secteurs desservis par le train et favorise les échanges. Connecté à l’estuaire et au réseau routier, il complète le transport fluvial et terrestre. Le développement ferroviaire à la fin du 19e siècle bénéficie de celui de l’économie portuaire et industrielle du port de Bordeaux. Alors que se renforce le rôle stratégique de ses satellites estuariens – Blaye, Pauillac et Le Verdon – qui présentent une situation avantageuse et permettent l’allègement des navires, de nouvelles installations sont créées, véritables interfaces entre les terres et les eaux, entre les trains et les bateaux.
En 1913, le Conseil général donne un avis favorable sur l’établissement d’un bac reliant Blaye et Lamarque mais le coût, trop élevé, suspend le projet. Dans les années 1930, l’essor de l’automobile entraîne la mise en service de bacs adaptés à l’embarquement des véhicules, et des infrastructures supplémentaires, notamment des cales inclinées. En 1932, la Commission des Travaux publics décide la construction de trois cales d’accostage en béton armé à Blaye, Lamarque et Pauillac, confiée aux Ateliers et Chantiers maritimes du Sud-Ouest et Bacalan Réunis.
L’entre-deux-guerres est marqué par la création du Port autonome de Bordeaux en 1924, avec le développement des avant-ports à Pauillac, Blaye et au Verdon.
Détail de l'historique
Périodes |
Principale : Moyen Age Principale : Temps modernes Principale : 19e siècle Principale : 1ère moitié 20e siècle |
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Description
Le port peut être défini comme un "abri naturel ou artificiel aménagé pour recevoir les navires, muni d'ouvrages et d'installations nécessaires à l'embarquement et au débarquement des passagers ou des marchandises, ainsi que d’autres installations associées au trafic maritime (stockage, entretien, réparations, etc.)". Tantôt port de commerce, port militaire, port de pêche, mais aussi plus récemment port industriel ou port de plaisance, les ports estuariens ont été aménagés pour répondre aux exigences du commerce et de la navigation.
Les ports ont été étudiés notamment à travers une typologie de leurs aménagements :
-les peyrats : épis en pierre disposés perpendiculairement aux rives, ils servent de cales permettant le chargement et le déchargement des marchandises. Ces peyrats se composent d’une structure en bois remplie et pavée de moellons. Inclinés, ils restent accessibles quel que soit le niveau des eaux. Rive gauche, les peyrats se concentrent sur les bords de la Garonne, sur les rives des îles et dans les ports entre Macau et Saint-Seurin-de-Cadourne. La rive droite de l’estuaire, ainsi que plus en amont sur la Dordogne, en est également équipée. Le peyrat semble bien correspondre à un aménagement des rives dans la partie la plus fluviale de l’estuaire, en amont, à proximité de la confluence et dans le secteur des îles. Plus en aval, au plus large, et dans les zones de marais, les chenaux ont été modifiés et améliorés afin de faciliter le transit des marchandises.
-les cales inclinées dans les chenaux, associées à des vannes et des retenues d'eau (bassin de port, bassin de chasse). Des perrés sont également construits : si l’étymologie est semblable à celle du peyrat, la forme diffère : selon les devis consultés, le perré constitue le mur de soutènement d’une cale inclinée ou d’un quai ; il vient également renforcer les rives d’un chenal.
-les digues, môles et jetées dans les ports de l'embouchure : l’objectif est d’abriter les ports concernés des forts courants. Il s’agit également, dans certains ports d’esteys – aux Monards, à Saint-Seurin-d’Uzet, à Port-Maubert – de rectifier et d’encadrer le chenal par de longues jetées formant digues, protégeant ainsi le port d’échouage de l’envasement. Elles sont parfois munies de musoirs à leur extrémité.
-les débarcadères des bateaux à vapeur : ces structures en bois, qui doivent s’adapter au régime de l’estuaire, sont formées d’un appontement fixe en charpente avec tablier mobile qui, s’appuyant sur un ponton affourché à son extrémité, suit les mouvements de la marée et permet d’embarquer et de débarquer en s'adaptant à la marée.
-les équipements liés aux bacs : cales, salles d'attente.
-les équipements des ports industriels : appontements, môles d'escale.
L'espace portuaire a également été interrogé, notamment à travers l’organisation nécessaire des échanges de marchandises qui se traduit par la présence de constructions spécifiques : bâtiments pour la perception des droits et des taxes pour le compte du roi ou des autorités locales (bureau des fermes du roi, pataches et chaloupes, corps de douane, bureau d'octroi), bâtiments pour le service des pilotes, entrepôts ou espaces de stockage des marchandises, halles, marchés, etc.
Un dossier de synthèse sur les ports de la rive saintongeaise a été réalisé, réunissant 15 espaces portuaires étudiés dans ce secteur.
En Gironde, 35 dossiers concernent la rive gauche ; 15 sur la rive droite.
Informations complémentaires
Type de dossier |
Dossier collectif, aire d'étude |
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Référence du dossier |
IA33010167 |
Dossier réalisé par |
Steimer Claire
Conservatrice du patrimoine au sein du service du patrimoine et de l'Inventaire. Suire Yannis Conservateur en chef du patrimoine au Département de la Vendée à partir de 2017. Beschi Alain Chercheur et conservateur du patrimoine au sein du service du patrimoine et de l'Inventaire en Aquitaine, puis Nouvelle-Aquitaine (1994-2023). |
Cadre d'étude |
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Date d'enquête |
2010 |
Copyrights |
(c) Conseil départemental de la Gironde, (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel |
Partenaires |
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Citer ce contenu |
Ports de l'estuaire de la Gironde, Dossier réalisé par Steimer Claire, (c) Conseil départemental de la Gironde, (c) Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel, https://www.patrimoine-nouvelle-aquitaine.fr/Default/doc/Dossier/f86d7f47-2be9-4ac6-a379-3a47e7aa99fe |
Titre courant |
Ports de l'estuaire de la Gironde |
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Dénomination |
port |